Lettre x représentant une icône de fermeture
Portrait en couleur d’un homme blond en chemise blanche. Se superposent des images en transparence.

© Owen Eric Wood, Self Portrait, 2004

Lucie Szechter
Son propre visage en partage

Projection et rencontre

Mercredi 23 mai 2018, 19h
Dazibao, Montréal

Entrée libre.



5455, avenue de Gaspé, #109 (RC), Montréal
Entrée libre. Nombre de places limité.
Priorité accordée aux personnes ayant fait une réservation

Cinquième et dernière itération des soirées dv_vd pour l’année 2017-2018, une fructueuse collaboration entre Vidéographe et Dazibao. Son propre visage en partage est un projet de la chercheuse et artiste française Lucie Szechter réalisé à partir de la collection de Vidéographe dans le cadre d’une résidence de recherche et de commissariat.

Avec Son propre visage en partage, Lucie Szechter interroge les enjeux soulevés par le visage dans la pratique de l’autofilmage. « Autofilmage » est ici entendu au sens assez large dans la mesure où, pour la chercheuse, il y a autofilmage dès lors que le – ou la – cinéaste est présent.e à l’écran dans son propre film. Dans le cadre de cette résidence, Lucie Szechter se propose d’examiner plus spécifiquement la question suivante : « Qu’est-ce que se filmer soi-même comme un autre ? » et ce, à travers différents axes.

 

« Qu’est ce que l’autofilmage ?
Littéralement Auto : du grec αὐτὸς signifiant « par soi-même » et Filmage : action de filmer. Se filmer soi-même. Le premier dispositif d’autofilmage qui pourrait nous venir en tête est certainement celui d’une caméra au poing retournée vers la personne qui se filme elle-même. Comme c’est le cas pour les « selfies »-vidéos tournées avec un cellulaire. L’entrée dans le champ du bras qui tient l’appareil d’enregistrement est un indice simple à identifier. Le geste associe au sein même du plan les deux fonctions de l’auteur-e de cet enregistrement : la personne filmée est également la personne qui filme, et vice versa.

Qu’en serait-il si l’auteur-e de cette vidéo – ou de ce film – avait posé sa caméra sur un trépied, avait lancé l’enregistrement et s’était assis-e devant l’objectif ? Et qu’en serait-il si l’auteur-e avait demandé à un-e cameraman de le ou la filmer ? Selon la définition qui nous intéresse, il s’agirait bien d’autofilmages. L’autofilmage étant ici compris au sens large : dès lors que la personne qui réalise le film décide d’entrer physiquement dans le champ de son propre film, de Jonathan Caouette (Tarnation…), à Vito Acconci (Theme Song…), à Sylvie Laliberté (Bonbons Bijoux…), à Agnès Varda (Les Glaneurs et la Glaneuse…), à Nanni Moretti (Journal intime…), à Charlie Chaplin (Les Temps modernes…) ou encore tous les caméos – ces apparitions fugaces dont raffolent les cinéphiles – d’Alfred Hitchcock dans ses propres films (L’Inconnu du Nord-Express…). Le spectre de l’autofilmage est très large et nous donnera peut-être une bonne idée de listes à dresser pendant nos longues soirées d’hiver. En soi, le recours à l’autofilmage n’est donc pas cantonné à un genre cinématographique, il n’est qu’un outil parmi d’autres choisis par l’auteur-e pour mettre en scène ses images. Néanmoins, toutes ces apparitions – qu’elles soient de quelques secondes ou de plusieurs heures – ont ceci en commun : elles ne sont jamais anodines. Elles font toujours événement. À des degrés évidemment très différents, dès lors que le spectateur reconnaît la personne du ou de la réalisatrice dans le champ, une dimension réflexive semble inévitablement s’ajouter au personnage qu’il ou elle incarne à l’écran. Certains gestes d’autofilmage peuvent même être clivant et agacer autant qu’émouvoir comme c’est le cas pour ceux de Xavier Dolan, Alain Cavalier ou Maïwenn par exemple.

Ce que je propose est une programmation de plusieurs films – ou d’extraits significatifs – où l’auteur-e se met en scène lui/elle-même à l’écran. En composant ce commissariat, je me suis à la fois posé la question du côté de la réception – les spectateurs – et du côté de l’énonciation – les cinéastes. Qu’est-ce que cela me fait à moi, en tant que spectatrice, de savoir que la personne filmée dans le champ est aussi celle qui réalise le film ? Qu’induit par exemple le choix de ne pas avoir pris un acteur pour incarner le personnage que nous voyons à l’écran plutôt que le/la réalisatrice lui/elle-même ? Et, du côté de l’auteur-e, qu’elles pouvaient bien être ses motivations lorsqu’il ou elle a choisi d’investir son film de sa propre présence physique ? Je vous laisse apprécier ces œuvres à l’aune de ces questions. Sachant qu’il y aura bien sûr autant de réponses possibles que de spectatrices et de spectateurs dans la salle. Bonne séance ! »

Lucie Szechter

 

PROGRAMME (93 min)
Abba Mao, Pascal Lièvre, 2011, 4 min 30 s
L’image de l’Afrique au Québec, Cheikh Tidiane Gadio, 1986, 27 min  (extrait 7 min 35 s)
AD INFINITUM., Lydie Jean-Dit-Pannel, 2017, 34 min (extrait 6 min 53 s)
Cut the parrot (Coupez le perroquet), Donigan Cumming, 1996, 40 min (extrait 6 min 53 s)
You Must Remember This, marshalore, 1978-1979, 26 min
PAUSE
Manipuler son corps, Laëtitia Bourget, 1998, 4 min 30 s
Self portrait, Eric Owen Wood, 2004, 2 min 45 s
Du front tout le tour de la tête, Chantal duPont, 2000, 30 min (extrait 8 min 11 s)
Got away in the dying moments, Dennis Day et Ian Middleton, 1992, 5 min
Le récit d’A, Esther Valiquette, 1990, 20 min

 

Biographie
Née à Nantes (France) en 1987, Lucie Szechter a obtenu sa Maîtrise en Études Cinématographiques à l’Université de Montréal avant d’intégrer le programme doctoral en recherche-création « Art et Sciences de l’art » à l’École de Recherche Graphique (Bruxelles) et l’Université de Liège avec la bourse nationale Fresh allouée par le FNRS. En 2014, elle tourne son premier court-métrage de fiction Plage(s) produit par le Groupe de Recherches et d’Essais cinématographiques (G.R.E.C). Plage(s) a été sélectionné dans de nombreux festivals, notamment à Côté Court (Pantin), au Festival International de Films de Femmes (Créteil), et a reçu le prix « Courts d’ici 2014 » à Nice pour Un festival c’est trop court. Lucie Szechter a été invitée l’année suivante par le centre d’art contemporain le BAL à Paris pour réaliser un projet cinématographique avec des enfants dans le cadre de leur programme « La Fabrique du regard ». En 2016 elle a finalisé son second film, 27 ans, un travail documentaire articulant témoignages sonores et found footage. Fin 2016, sur l’invitation du G.R.E.C, de France 2 et l’Agence du court métrage, elle réalise un film d’une minute pour une collection hommage aux opérateurs Lumière. Lucie Szechter tourne actuellement son nouveau film, L’Oreille décollée, produit par Aurora films avec le soutien de la région Pays de la Loire et du CNC. Elle écrit également sur le cinéma dans des revues canadiennes et françaises. cargocollective.com/lucieszechter

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© Après les glaciers, Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne, 2022

PROGRAMME GRATUIT SUR VITHÉQUE – La Trilogie des Glaciers
Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne

VITHÈQUE

Gratuit



Avec La trilogie des glaciers, Vidéographe est fier de présenter pour la première fois sur Vithèque le travail des artistes Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne. Fragile MonumentAlbedo et Après les glaciers font partie d’un corpus d’oeuvres récemment acquis par Vidéographe et qu’il nous tarde de vous partager.

 

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En examinant l’évolution de zones glaciaires en Suisse, cette série de trois courts-métrages porte une attention aux rapports complexes que nous entretenons avec les milieux naturels. Elle soulève une réflexion sur des perspectives d’écologies futures, où se conjuguent des états d’hybridité, de vulnérabilité et du sublime.

Point d’arrimage de cette trilogie, le glacier du Rhône, qui culmine à 3600 mètres d’altitude, est devenu depuis la fin du XIXe siècle un objet d’étude scientifique et un important site d’affluence touristique des Alpes suisses. Indice éloquent d’une disparition anticipée, une partie de la zone d’ablation du glacier, sujette à la fonte, est recouverte de mosaïques géotextiles afin de le protéger des radiations solaires. Si ces couvertures réfléchissantes peuvent contribuer à diminuer l’accélération du retrait glaciaire, cette pratique demeure toutefois contestée par le milieu scientifique. Évocateur d’un décor énigmatique, de linceuls ou de refuges temporaires, le déploiement de ces bâches représente une tentative de contrôle anthropique sur le paysage dans un contexte de bouleversements climatiques. Dans un travail immersif de l’image et du son, Fragile Monument explore les échelles de temporalité propres au glacier, à l’eau, à l’environnement minéral et leur entremêlement avec des rythmes humains.

Albédo offre une incursion visuelle dans le travail de terrain de chercheurs en glaciologie de l’ETH à Zurich sur le glacier du Rhône. Ils y déploient des outils techniques afin de produire des relevés dans le cadre d’activités de surveillance du glacier, dont les fissurations et les signes d’affaissement sont tangibles. Ces images s’accompagnent d’une explication scientifique de l’effet albédo : la capacité de réflexion du rayonnement solaire par une surface, pour lequel un indice élevé (associé à des surfaces enneigées) protège la glace de la fonte. Les boucles de rétroaction initiées par les changements climatiques chamboulent dorénavant l’équilibre précaire des glaciers, leur épiderme étant fortement sensible à celles-ci. Observé, étudié et drapé, le glacier du Rhône est présenté comme un hyper-objet climatique, un « quasi-artéfact dont l’aura sublime se rapporte dorénavant au vertige de sa disparition1 ».

Le dernier chapitre de la trilogie, Après les glaciers, présente le point de vue du chercheur scientifique et glaciologue Jean-Baptiste Bosson, qui milite pour la protection des glaciers et des marges glaciaires depuis une perspective écosystémique, dégagée d’un point de vue anthropocentrique. Dans ce film, le regard s’étend à différentes zones alpines en Suisse exposées au retrait glaciaire. À travers ce phénomène, des milieux intouchés émergent sous la glace, suscitant une réflexion sur leur protection comme des havres potentiels de biodiversité. Sur fond de plans macroscopiques de bulles d’air emprisonnées dans la glace, sortes d’archives vivantes donnant à sentir le temps profond du glacier, Bosson affirme que les glaciers constituent des objets sensibles qui nous permettent de mieux saisir l’histoire du climat.

Cette trilogie a été réalisée lors d’un séjour au Programme principal de résidence de La Becque (Suisse) en 2021-2022, avec le généreux soutien du Conseil des arts du Canada et du Conseil des arts et des lettres du Québec. Elle s’inscrit au sein d’un corpus évolutif intitulé La Montagne radieuse, présenté sous forme d’exposition, de photographies et de vidéos, qui explore les imaginaires et interprétations plurielles de la montagne, entre transformations du paysage, manifestations technologiques et vertus thérapeutiques reliées au legs de la modernité en milieu alpin.

« Au-delà de sa prestance monolithique, la montagne se révèle être un objet complexe, dont la portée irradie sur plusieurs plans. Structuré en chapitres interreliés, La Montagne radieuse […] procède par étoilement pour explorer la myriade de facettes anthropiques par lesquelles nous entrons en relation avec la montagne. S’y enchevêtrent la nature, les technologies, l’architecture, l’histoire, l’hydrologie, la géomorphologie, la santé, la spiritualité et le bien-être dans une hétérochronie mêlant des échelles de temps humain, glaciologique et géologique2. »

 

– Comprend des extraits (1 et 2) de l’essai de Gentiane Bélanger, commissaire de l’exposition La Montagne radieuse, Galerie d’art Foreman de l’Université Bishop’s, 2022