Lettre x représentant une icône de fermeture
Croquis en noir et blanc, devanture du centre d'artistes Diagonal, Montreal

© Karine Savard, croquis de la vitrine extérieure du centre Diagonale

Karine Savard, Affichez le travail

RÉSIDENCE DE RECHERCHE ET DE COMMISSARIAT

2020-2021



Vidéographe est heureux d’annoncer que l’artiste Karine Savard a été retenue pour sa prochaine de recherche et de commissariat pour son projet Afficher le travail 

Artiste et chercheuse montréalaise, Karine Savard réalise des affiches de films pour gagner sa vie et, dans sa pratique artistique, elle développe une réflexion sur son propre statut de travailleuse autonome dans l’industrie culturelle en détournant des dispositifs de présentation publicitaires à des fins artistiques (panneaux publicitaires, palissades de chantier, vitrines, etc.). Dans le cadre de la résidence de recherche et de commissariat, elle sélectionnera des œuvres vidéos des années 1970-1980 produites à Vidéographe et portant sur le thème du travail (débuts de l’organisation syndicale, initiatives d’autogestion, prises de parole de travailleurs, etc.) afin de réaliser des affiches inspirées de ces pamphlets-vidéos du passé.

Les affiches produites, détournées par l’anachronisme de leur fonction promotionnelle habituelle, seront exposées au Musée d’art de Joliette et au centre d’artistes Diagonale au sein d’une installation à laquelle elle intégrera d’autres médias (vidéo, son, murale d’images, etc.). Les vitrines du centre Diagonale seront également investies comme espace d’affichage afin d’inviter, hors les murs, à une réflexion sur les mutations du travail et ses répercussions sur l’écosystème urbain. Le centre d’artiste se trouve en effet dans un ancien bâtiment industriel du Mile-End (à Montréal), revitalisé pour accueillir plusieurs entreprises et organismes culturels. Par ce geste, elle souhaite créer des ponts entre les luttes de la période industrielle passée et celles à mener dans le contexte du capitalisme cognitif actuel, un contexte dans lequel évoluent les artistes et les travailleurs culturels d’aujourd’hui.

À ce titre, l’installation explorera entre autres comment les nouveaux modes de travail, par exemple le travail indépendant ou l’économie numérique, affectent les travailleurs d’aujourd’hui. L’hyperflexibilité, souvent associée aux milieux artistiques, tend à s’étendre de plus en plus à d’autres sphères professionnelles. Dans le contexte actuel, on peut même penser que l’accroissement du télétravail et de l’utilisation des nouvelles technologies accélèrera les transformations du monde du travail. Celles-ci entraîneront inévitablement des bouleversements dans son organisation, lesquels nécessiteront d’être balisés afin d’éviter que les travailleuses et travailleurs d’aujourd’hui ne soient l’objet de nouvelles formes d’exploitation.

 

BIOGRAPHIE
Karine Savard poursuit ici une réflexion sur l’art et le travail amorcée en 2015, en détournant la fonction habituelle des affiches de films pour mettre de l’avant l’enchevêtrement de son statut de travailleuse et celui d’artiste réfléchissant à son travail. Dans le passé, elle a notamment collaboré avec son père, qui est charpentier-menuisier, ce qui lui a permis d’explorer des enjeux comme le rapport entre le travail manuel et le travail intellectuel, la division du travail et sa reconnaissance dans le système capitaliste, la question des choix et des jugements esthétiques.

En plus de ses interventions furtives des dernières années, son travail a été présenté à la Galerie Leonard & Bina Ellen (Montréal). Elle poursuit actuellement un doctorat en études et pratiques des arts à l’Université du Québec à Montréal et est récipiendaire d’une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Son projet porte sur l’étude d’une archive composée de documents audiovisuels représentant le travail dans une filature de textile artificiel de Besançon en France, depuis sa mise en marche en 1892 jusqu’à sa fermeture définitive en 1982. L’exploration du croisement entre les histoires de l’industrie du textile artificiel et l’industrie des médias audiovisuels lui permet d’investiguer la transformation de la notion de travail dans le passage d’une économie industrielle à une économie basée sur l’information et la communication. karinesavard.com

 

© Après les glaciers, Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne, 2022

PROGRAMME GRATUIT SUR VITHÉQUE – La Trilogie des Glaciers
Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne

VITHÈQUE

Gratuit



Avec La trilogie des glaciers, Vidéographe est fier de présenter pour la première fois sur Vithèque le travail des artistes Virginie Laganière et Jean-Maxime Dufresne. Fragile MonumentAlbedo et Après les glaciers font partie d’un corpus d’oeuvres récemment acquis par Vidéographe et qu’il nous tarde de vous partager.

 

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En examinant l’évolution de zones glaciaires en Suisse, cette série de trois courts-métrages porte une attention aux rapports complexes que nous entretenons avec les milieux naturels. Elle soulève une réflexion sur des perspectives d’écologies futures, où se conjuguent des états d’hybridité, de vulnérabilité et du sublime.

Point d’arrimage de cette trilogie, le glacier du Rhône, qui culmine à 3600 mètres d’altitude, est devenu depuis la fin du XIXe siècle un objet d’étude scientifique et un important site d’affluence touristique des Alpes suisses. Indice éloquent d’une disparition anticipée, une partie de la zone d’ablation du glacier, sujette à la fonte, est recouverte de mosaïques géotextiles afin de le protéger des radiations solaires. Si ces couvertures réfléchissantes peuvent contribuer à diminuer l’accélération du retrait glaciaire, cette pratique demeure toutefois contestée par le milieu scientifique. Évocateur d’un décor énigmatique, de linceuls ou de refuges temporaires, le déploiement de ces bâches représente une tentative de contrôle anthropique sur le paysage dans un contexte de bouleversements climatiques. Dans un travail immersif de l’image et du son, Fragile Monument explore les échelles de temporalité propres au glacier, à l’eau, à l’environnement minéral et leur entremêlement avec des rythmes humains.

Albédo offre une incursion visuelle dans le travail de terrain de chercheurs en glaciologie de l’ETH à Zurich sur le glacier du Rhône. Ils y déploient des outils techniques afin de produire des relevés dans le cadre d’activités de surveillance du glacier, dont les fissurations et les signes d’affaissement sont tangibles. Ces images s’accompagnent d’une explication scientifique de l’effet albédo : la capacité de réflexion du rayonnement solaire par une surface, pour lequel un indice élevé (associé à des surfaces enneigées) protège la glace de la fonte. Les boucles de rétroaction initiées par les changements climatiques chamboulent dorénavant l’équilibre précaire des glaciers, leur épiderme étant fortement sensible à celles-ci. Observé, étudié et drapé, le glacier du Rhône est présenté comme un hyper-objet climatique, un « quasi-artéfact dont l’aura sublime se rapporte dorénavant au vertige de sa disparition1 ».

Le dernier chapitre de la trilogie, Après les glaciers, présente le point de vue du chercheur scientifique et glaciologue Jean-Baptiste Bosson, qui milite pour la protection des glaciers et des marges glaciaires depuis une perspective écosystémique, dégagée d’un point de vue anthropocentrique. Dans ce film, le regard s’étend à différentes zones alpines en Suisse exposées au retrait glaciaire. À travers ce phénomène, des milieux intouchés émergent sous la glace, suscitant une réflexion sur leur protection comme des havres potentiels de biodiversité. Sur fond de plans macroscopiques de bulles d’air emprisonnées dans la glace, sortes d’archives vivantes donnant à sentir le temps profond du glacier, Bosson affirme que les glaciers constituent des objets sensibles qui nous permettent de mieux saisir l’histoire du climat.

Cette trilogie a été réalisée lors d’un séjour au Programme principal de résidence de La Becque (Suisse) en 2021-2022, avec le généreux soutien du Conseil des arts du Canada et du Conseil des arts et des lettres du Québec. Elle s’inscrit au sein d’un corpus évolutif intitulé La Montagne radieuse, présenté sous forme d’exposition, de photographies et de vidéos, qui explore les imaginaires et interprétations plurielles de la montagne, entre transformations du paysage, manifestations technologiques et vertus thérapeutiques reliées au legs de la modernité en milieu alpin.

« Au-delà de sa prestance monolithique, la montagne se révèle être un objet complexe, dont la portée irradie sur plusieurs plans. Structuré en chapitres interreliés, La Montagne radieuse […] procède par étoilement pour explorer la myriade de facettes anthropiques par lesquelles nous entrons en relation avec la montagne. S’y enchevêtrent la nature, les technologies, l’architecture, l’histoire, l’hydrologie, la géomorphologie, la santé, la spiritualité et le bien-être dans une hétérochronie mêlant des échelles de temps humain, glaciologique et géologique2. »

 

– Comprend des extraits (1 et 2) de l’essai de Gentiane Bélanger, commissaire de l’exposition La Montagne radieuse, Galerie d’art Foreman de l’Université Bishop’s, 2022